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Claude Debussy est un compositeur français, né le 22 août 1862 à Saint-Germain-en-Laye et mort le 25 mars 1918 à Paris.
Regard de Debussy, Pierre Louys, vers 1900
Contretype, tirage argentique, 30 x 40 cm
" Il y a d’abord ces grands yeux noirs. Un regard porté vers l’invisible. Le hors-champ. La moustache se distingue à peine. La bouche semble charnue. Les contours sont flous. Une partie du visage est baignée de lumière ; l’autre est plongée dans l’ombre. À peine un front, plus de menton, une chevelure discrète : qui est cet homme ? Philippe Jacquier trouve le tirage chez « un marchand ». Au dos de l’image, il lit : Debussy. Selon le vendeur, la photographie provient du fonds Henri-Langlois, l’ancien fondateur et directeur de la Cinémathèque française. L’enquête commence. Est-ce bien Claude Debussy ? Il doute et contacte le musée Claude-Debussy à Saint-Germain-en-Laye. Une conservatrice lui confirme à la fois l’identité et l’existence d’une photographie identique dans les archives. Une question le tourmente. Pour quelles raisons l’image même présente-t-elle des marques de froissement à certains endroits ? Pierre Louÿs, photographe et poète, a noué une longue amitié avec Claude Debussy. Quand le premier publie Les Chansons de Bilitis, le second s’en inspire. Un jour de colère, Claude Debussy déchire le portrait que Pierre Louÿs avait pris de lui, en mai 1894. Sa femme, la cantatrice Emma Bardac, le récupère, recolle les morceaux et en fait plusieurs contretypes.
Le portrait, dans un mauvais état, se trouve au Centre de documentation Claude-Debussy à la Bibliothèque nationale de France. Le tirage est vertical, donnant à voir le visage en entier. Ici, l’image est coupée comme un panoramique de film. Inexplicable. La galerie Lumière des roses et le musée Debussy à Saint- Germain-en-Laye possèdent les deux seuls contretypes connus.
Couverture du programme pour la première de « L'Après-midi d'un faune » des Ballets Russes (chorégraphie de Nijinski) au théâtre du Châtelet à Paris, le 29 mai 1912. Dessin de Léon Bakst.
© AKG-images
Le Prélude à l'après-midi d'un faune, sous-titré Églogue pour orchestre d'après Stéphane Mallarmé, est une œuvre symphonique de Claude Debussy, composée entre 1892 et 18941.
L'œuvre est créée le 22 décembre 1894 par l'orchestre de la Société nationale de musique à Paris2. La direction en fut confiée au compositeur et chef d'orchestre suisse Gustave Doret2 et le solo de flûte interprété par Georges Barrère (1876-1944).
Debussy écrit dans le programme imprimé : « La musique de ce Prélude est une illustration très libre du beau poème de Stéphane Mallarmé. Elle ne prétend nullement à une synthèse de celui-ci. Ce sont plutôt des décors successifs à travers lesquels se meuvent les désirs et les rêves d'un faune dans la chaleur de cet après-midi. Puis, las de poursuivre la fuite peureuse des nymphes et des naïades, il se laisse aller au soleil enivrant, rempli de songes enfin réalisés, de possession totale dans l'universelle nature. »
La formation comporte trois flûtes, deux hautbois, un cor anglais, deux clarinettes, deux bassons, quatre cors, deux harpes, deux crotales (ou cymbales antiques) et la section de cordes, soit les deux sections de violons, les altos, les violoncelles et les contrebasses.
C'est une des œuvres les plus connues de Debussy1, dont le succès fut immédiat, et qui constitue le plus bel exemple de la musique impressionniste. Elle a été transcrite pour de nombreuses formations instrumentales, la plus jouée étant sans doute la réduction pour flûte (ou violon) et piano due à Gustave Samazeuilh.
L'Après-midi d'un faune Poème de Stéphane Mallarmé ,publication 1876 « J'y essayais de mettre, à côté de l'alexandrin dans toute sa tenue, une sorte de feu courant pianoté autour, comme qui dirait d'un accompagnement musical fait par le poète lui-même. » Stéphane Mallarmé.
« C'est avec la flûte du faune que commence une respiration nouvelle de l'art musical, non pas tellement l'art du développement musical que sa liberté formelle, son expression et sa technique. L'emploi des timbres y est essentiellement nouveau, d'une délicatesse et d'une sûreté de touche tout à fait exceptionnelles ; l'emploi de certains instruments comme la flûte, le cor ou la harpe, y est caractéristique de la manière dont Debussy les employa dans ses oeuvres les plus tardives ; les bois et les cuivres y trouvent une légèreté de main et une sûreté d'emploi telles que l'on se trouve en présence d'un miracle d'équilibre et de clarté sonore. Cette partition possède un pouvoir de jeunesse qui n'est pas encore épuisé, et, de même que la poésie moderne prend sûrement racine dans certains poèmes de Baudelaire, on peut dire que la musique moderne commence avec L'Après-midi d'un Faune. » (Pierre Boulez, Encyclopédie de la Musique. Fasquelle, 1958.)
L'oeuvre de Claude Debussy est une synthèse dans laquelle prend racine la modernité, son sens aiguë de l'expérimentation novatrice l'a fait associer sa musique à la poésie de Mallarmé et à la chorégraphie de Nijinsky, les trois créateurs ont ouvert les portes de la création contemporaine en rupture avec la tradition . Il est ainsi inévitable de citer " L'Après-midi d'un faune " comme oeuvre où les trois créateurs explorent et redessinent l'espace sonore, littéraire et chorégraphique.
Sous le nom de "L'Après-midi d'un faune ", en 1912, Vaslav Nijinski, avec les Ballets russes de Serge de Diaghilev, crée sur ce Prélude une chorégraphie qui révolutionne la pratique du moment de la danse.
Vaslav Fomitch Nijinski, aussi retranscrit Vaclav Nijinsky ou Vatslav Nizhinski, né à Kiev le 12 mars 1889 et décédé le 8 avril 1950 à Londres, est un danseur et chorégraphe russe d'origine polonaise
Ménélas a l'intention de tuer Hélène mais, frappé par sa beauté, il lâche son épée. Un Éros volant et Aphrodite, à gauche d'Hélène, regardent la scène. Détail d'un cratère attique à figures rouges, 450-440 av. J.-C., découvert à Gnathia (actuelle Egnazia, Italie) Paris, Musée du Louvre. Un des vases repris par Nijinski pour sa chorégraphie
Lors de visites au musée du Louvre avec Léon Bakst, Nijinski fut inspiré par les vases grecs à figures rouges de la galerie Campana, particulièrement des cratères attiques et lucaniens montrant des satyres poursuivant des nymphes et des sujets tirés de l'Iliade. Il fit des relevés sous formes de croquis des différentes attitudes qui pouvaient l'inspirer pour sa chorégraphie
"Prélude à l'après-midi d'un faune ".d'après le poème de Stéphane Mallarmé, œuvre symphonique de Claude Debussy, composée entre 1892 et 18941. chorégraphie Nijinsky avec Lydia Nelidova, 1912. Paris,© photo Adolf de GAYNE DE MEYER (1868 - 1946)
L'argument du ballet n'est pas l'adaptation du poème de Mallarmé, mais une scène qui le précède.
" Sur un tertre un faune se réveille, joue de la flûte et contemple des raisins. Un premier groupe de trois nymphes apparaît, suivi d'un second groupe qui accompagne la nymphe principale. Celle-ci danse au centre de la scène en tenant une longue écharpe. Le faune, attiré par les danses des nymphes, va à leur rencontre pour les séduire mais elles s'enfuient. Seule la nymphe principale reste avec le faune ; après le pas de deux, elle s'enfuit en abandonnant son écharpe aux pieds du faune. Celui-ci s'en saisit, mais trois nymphes tentent de la reprendre sans succès, trois autres nymphes se moquent du faune. Il regagne son tertre avec l'écharpe qu'il contemple dans une attitude de fascination. La posant par terre il s'allonge sur le tissu "
"Prélude à l'après-midi d'un faune ".d'après le poème de Stéphane Mallarmé, œuvre symphonique de Claude Debussy, composée entre 1892 et 18941. chorégraphie Nijinsky avec Lydia Nelidova, 1912. Paris, photo Adolf de GAYNE DE MEYER (1868 - 1946)
La particularité de la chorégraphie de Nijinski était de rompre avec la tradition classique en proposant une nouvelle manière de concevoir la danse basée sur des mouvements latéraux et frontaux inspirés des figures profilées des vases grecs. Dans le ballet Nijinski n'effectue qu'un seul saut, qui symbolise le franchissement du ruisseau où se baignent les nymphes6.
Fin 1910 à Saint-Pétersbourg Nijinski et sa sœur expérimentèrent les attitudes qu'il avait notées au Louvre. Ce travail de préparation continua à Paris jusqu'en 1911. Les premières répétitions se déroulèrent à Berlin en janvier 1912, révélant les difficultés liées à la chorégraphie. Les danseuses avaient du mal à adopter et danser dans des postures contraires à la tradition classique qui les obligeait à se déplacer les jambes et la tête de profil et le buste de face. La volonté d'innover du chorégraphe lui fit rejeter des positions hérités de la danse classique comme l'en-dehors et les pointes, les danseuses devaient danser pieds nus.
"Prélude à l'après-midi d'un faune ".d'après le poème de Stéphane Mallarmé, œuvre symphonique de Claude Debussy, composée entre 1892 et 18941. chorégraphie Nijinsky, 1912. Paris,© AKG-imagesphoto Adolf de GAYNE DE MEYER (1868 - 1946)
"Prélude à l'après-midi d'un faune ".d'après le poème de Stéphane Mallarmé, œuvre symphonique de Claude Debussy, composée entre 1892 et 18941. chorégraphie Nijinsky, 1912. Paris,photo Adolf de GAYNE DE MEYER (1868 - 1946)
La conception du décor et des costumes fut confiée à Léon Bakst. Le décor représentant un paysage sylvestre dont le style se rapprochait du symbolisme de Puvis de Chavannes ne fut pas apprécié par Nijinski qui voulait un motif plus épuré dans l'esprit des toiles de Gauguin plus approprié à une chorégraphie « cubiste » comme le suggérait Diaghilev. Ce décor fut remplacé en 1922 par une nouvelle toile en camaïeu de gris peinte par Picasso, puis à partir de 1929 par un nouveau décor du prince Schervachidze. Afin d'accentuer la frontalité de la chorégraphie, le décor fut installé à l'avant-scène, de sorte que les danseurs ne puissent évoluer que dans un espace réduit de deux mètres de profondeur, et l'éclairage devait donner au ballet l'apparence d'un bas-relief.
Par contre les costumes et les maquillages furent immédiatement adoptés. Les perruques, inspirées des coiffures des déesses grecques, étaient faites de fils collés, les tuniques des nymphes étaient façonnées avec de la gaze plissée. Pour le maillot du faune, Léon Bakst peignit les taches directement sur le tissu
"Prélude à l'après-midi d'un faune ".d'après le poème de Stéphane Mallarmé, œuvre symphonique de Claude Debussy, composée entre 1892 et 18941. chorégraphie Nijinsky, 1912. Paris,© AKG-images
"Prélude à l'après-midi d'un faune ".d'après le poème de Stéphane Mallarmé, œuvre symphonique de Claude Debussy, composée entre 1892 et 18941. chorégraphie Nijinsky, 1912. Paris,© AKG-images
"Prélude à l'après-midi d'un faune ".d'après le poème de Stéphane Mallarmé, œuvre symphonique de Claude Debussy, composée entre 1892 et 18941. chorégraphie Nijinsky, 1912. Paris,© AKG-images
"Prélude à l'après-midi d'un faune ".d'après le poème de Stéphane Mallarmé, œuvre symphonique de Claude Debussy, composée entre 1892 et 18941. chorégraphie Nijinsky, 1912. Paris,© AKG-images
La modernité de Claude Debussy est présente dans son oeuvre " Jeux "
Vaslav Nijinsky in the Ballet Jeux by Claude Debussy. Artist: Gerschel, Charles (1871-1948
Jeux est un ballet en un acte de Claude Debussy, chorégraphié par Vaslav Nijinski, décors et costumes de Léon Bakst.
Commandée au mois de juin 1912, la musique est composée par Debussy pendant l'été de cette même année. La particelle est achevée le 2 septembre, une réduction pour piano étant remise à Nijinsky et à Diaghilev quelques jours plus tard (elle sera publiée par Durand en avril 1913). La partition d'orchestre sera publiée chez le même éditeur avec le sous-titre Poème dansé.
Créé par les Ballets russes le 15 mai 1913 au Théâtre des Champs-Élysées de Paris, sous la direction de Pierre Monteux, le ballet a comme interprètes Nijinski, Tamara Karsavina et Ludmila Schollar.
C'est la première pièce que Debussy écrit pour le ballet, à la demande de Diaghilev, l'Après-midi d'un faune créé par Nijinsky en 1910 s'appuyant sur une œuvre antérieure (1894).
Vaslav Nijinsky in the Ballet Jeux by Claude Debussy. Artist: Gerschel, Charles (1871-1948
Nijinski, en même temps qu'il compose la chorégraphie du Sacre du printemps, prépare celle de Jeux, une œuvre difficile, qu'il rend confuse par le mélange de mouvements « modernes » (inspirés du tennis, du golf et des principes de Jaques-Dalcroze) et de danse académique (les filles dansent sur pointes, mais pieds parallèles). Le ballet est accueilli froidement et seule la musique de Debussy a survécu jusqu'à aujourd'hui. Ultime œuvre pour orchestre achevée par le compositeur, son importance n'a cessé d'être réévaluée au cours du XXe siècle.
L'argument se veut une « apologie plastique de l'homme de 1913 » : « Dans un parc au crépuscule, une balle de tennis s’est égarée ; un jeune homme, puis deux jeunes filles s’empressent à la rechercher. La lumière artificielle des grands lampadaires électriques qui répand autour d’eux une lueur fantastique leur donne l’idée de jeux enfantins ; on se cherche, on se perd, on se poursuit, on se querelle, on se boude sans raison ; la nuit est tiède, le ciel baigné de douces clartés, on s’embrasse. Mais le charme est rompu par une autre balle de tennis jetée par on ne sait quelle main malicieuse. Surpris et effrayés, le jeune homme et les deux jeunes filles disparaissent dans les profondeurs du parc nocturne. »
Nous pouvons mettre en lien et dire que " Jeux " de Debussy est parmi les sources d'inspiration de Michelangelo Antonnioni et son film " Blow up " 1966, dont la scène finale est une partie de tennis sans balle et sans raquette jouée par des mimes invitant le héros du film Thomas à les rejoindre .
VOIR L'ARTICLE " BLOW UP D'ANTONIONI "
Voici un extrait de l'articke sur Ciné Club de Caen de " Blow up " : Thomas retrouve Ron dans une fête où il finit par s'endormir. Au matin, Il rentre chez lui et découvre le peintre et sa compagne faisant l'amour, un contrechamp sur un couteau laisse à penser qu'il songe à la tuer mais il repart en silence. Plus tard, elle lui explique qu'elle n'a pas l'intention de quitter le peintre. Il lui explique qu'il a vu un meurtre, elle lui conseille d'appeler la police.
Il se rend sur les lieux du crime, le cadavre a disparu. Le vent souffle dans les arbres dominés par une affiche publicitaire. Les comédiens du début arrivent dans leur véhicule et miment un jeu de tennis. La caméra, d'abord statique, se prend du mouvement des joueurs et quand la balle sort du terrain, les comédiens fixent le héros pour qu'il aille chercher la balle. Il se soumet à leur injonction muette et renvoie la balle. La caméra s'élève l'isolant sur l'étendue verte ; Thomas entend le son de la balle de tennis imaginaire.
La musique, la poésie, la chorégraphie et finalement le cinéma sont la synthèse que Debussy aura créée et offerte à tous, un nouveau paragone dont Léonard de Vinci dirait la poésie se danse et la musique se regarde lorsqu'elle ponctue l'espace.