211-BILL VIOLA, DAN FLAVIN


LUMIÈRE ET ARCHITECTURE CHEZ BILL VIOLA ET DAN FLAVIN


Bill Viola explore, à travers ses installations vidéos, une structure dramatique en lien avec ce qu’il appelle l’ « oeil intérieur » du spectateur, les images sont des « projections du spectateur, et tout l’intérêt se trouve dans l’interaction entre le spectateur et l’image. " Certaines expériences réapparaissent sans cesse en images , ces images sont cruciales pour moi, elles sont la base de toute mon œuvre ». L'utilisation des peintures de la Renaissance est en lien avec cette quête des archétypes que nous avons en commun.
En 2002 Bill Viola réalise son installation “ Going forth by day “
 

dont le titre est tiré du Livre de Morts Égyptien

Le spectateur est enveloppé dans un environnement d'images métaphysiques qui toutes défilent simultanément : l'entrée dans l'installation par l'écran de feu, le départ d'un mort dans un bateau sur l'eau , l'attente dans le désert en sommeil/rêve, la marche/temps de la vie quotidienne dans la forêt/nature création originelle, le déluge/purification, le retour, l'eau /transformations, les cycles


Bill Viola, Going Forth By Day , 2002, vue d'ensemble , installation vidéo sonore, cycle de cinq projections, 36 minutes, Collection Pinault, Photo Kira Perov

Bill Viola, Going Forth By Day (détail), 2002, installation vidéo sonore, cycle de cinq projections, 36 minutes, performers : Weba Garretson, John Hay, Collection Pinault, Photo Kira Perov,

Le spectateur entre dans la pièce de l'installation par cette projection, il passe au travers du feu

Il y a ensuite cette longue marche à travers la forêt, des hommes des femmes chacun avec sa valise pour seule compagnie
“Le paysage est le lien entre notre moi extérieur et notre moi intérieur”. Bill VIOLA


Bill Viola, Going Forth By Day (détail), 2002, « The forest » (panneau 2), installation vidéo sonore, cycle de cinq projections, 36 minutes, Collection Pinault, Photo Kira Pero

Paolo UCCELLO. Chasse nocturne (v. 1460) détrempe sur bois, 65x 165 cm, Ashmolean Museum, Oxford, England


Nous pouvons içi évoquer le lien entre Bill Viola et les artistes de la Renaissance italienne, avec cette affinité entre la marche dans la forêt de Going forth by day et la Chasse nocturne de Paolo Ucello, cette chasse étant le combat intérieur entre notre ombre et notre lumière que nous menons dans le parcours de la vie . Ce parcours étant le fondement de l'installation de Bill Viola " Going forth by day "
Bill Viola, Going Forth By Day (détail), 2002, « The Deluge » (panneau 3), installation vidéo sonore, cycle de cinq projections, 36 minutes, Collection Pinault, Photo Kira Perov

Bill Viola, Going Forth By Day (détail), 2002, « The Departure » (panneau 1), installation vidéo sonore, cycle de cinq projections, 36 minutes, Collection Pinault, Photo Kira Perov


Bill Viola, Going Forth By Day (détail), 2002,  (panneau 4), installation vidéo sonore, cycle de cinq projections, 36 minutes, performers : Weba Garretson, John Hay, Collection Pinault, Photo Kira Perov

Bill Viola, Going Forth By Day (détail), 2002, « First Light » (panneau 5), installation vidéo sonore, cycle de cinq projections, 36 minutes, performers : Weba Garretson, John Hay, Collection Pinault, Photo Kira Perov
Nous retrouvons dans toutes les installations de Bill VIOLA cette même fragmentation et dilution de l'image, très ralentie, étirée elle est entre apparition et disparition . La mise en abyme de la personne dans l'eau, dans l'oeil des animaux, l'incrustation des choses les unes dans les autres, la chaine infinie de la création mais dans un sur place et non pas dans un déroulement dans le temps.

La vidéo est utilisée comme un medium fluide , aqueux, menant l’image aux limites de l'explosion et de l’évanouissement , pour explorer le temps, la mémoire, l’âme humaine , les cycles de la vie, les retours , les absences, les fusions de l’âme humaine et de la nature, le mouvement et l’échange entre l’espace mental et la réalité matérielle.

La scénographie fait que les présentations prennent possession de l'espace et ainsi les images créent une architecture, invisible mais palpable par la puissance des visuels, le rythme de leur projection et la matière du son qui emplissent tout l'espace physique et l'espace mental .

L'espace des installations de Viola devient matière, il est plein :

les projections forment un cocon autour du spectateur tout entier, 
elles se tissent à partir du corps du spectateur, jusqu'à ne faire qu'un
 avec lui, on habite les projections de Bill Viola tout autant qu'elles nous habitent . Elles appartiennent à l'histoire des éléments fondamentaux, à notre histoire. Y sont utilisés : les éléments architecturaux comme espace théatraux mettant en scéne, le parcours de êtres de l'ombre à la lumière, en utilisant un médium de projection lumineux et les architectures de Giotto Di Bondono

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Giotto'sv. 1267-1337 Colle di Vespignano Scènes de la vie de Joachim : l’annonce à sainte Anne. 1304-1306. Fresque, 200 x 185 cm. Padoue: la chapelle Scrovegni ou chapelle de l’Arena



Giotto. Annonciation à Sainte-Anne (1304-06). Fresque, 200 × 185 cm, Chapelle Scrovegni, Padoue. Un ange annonce à sainte Anne la naissance de Marie. Giotto en a fait une scène d'intérieur, s'imposant ainsi de traiter le volume de la pièce. Il y parvient de façon empirique (les lois de la perspective ne sont pas connues) avec un brio tout à fait saisissant pour l'époque. Les frontons extérieurs triangulaires et le péristyle sous lequel une servante est assise impriment à la composition un effet de profondeur. L'artiste accentue le réalisme de la scène en meublant l'intérieur d'objets familiers.



L'église de Santa Maria sopra Minerva dans la Piazza del Comune dans la ville d' Assise se présente comme la basilique du même nom à Rome sur le site d'un temple romain dédié àMinerva , construit au Ier siècle avant notre ère. Du temple romain, la façade et le pronaos ont été conservés.




L'église de Santa Maria sopra Minerva dans la Piazza del Comune dans la ville d' Assise se présente comme la basilique du même nom à Rome sur le site d'un temple romain dédié àMinerva , construit au Ier siècle avant notre ère. Du temple romain, la façade et le pronaos ont été conservés.

Le Temple de Minerve (aujourd'hui l'église Santa Maria sopra Minerva) est un ancien temple situé à Assise, en Ombrie, érigé au Ier siècle av. J.-C. Du temps d'Auguste sur la place du forum, aujourd'hui Piazza del Comune. Initialement dédié à Hercule par Gneus Cesius et Titus Cesius Priscus, il est dédié ensuite à Minerve lors de la construction d'une statue de femme.
Pendant l'ascension du christianisme les martyrs chrétiens sont condamnés sur les marches, entre les colonnes. Après cet ascension du christianisme comme religion officielle romaine, le bâtiment perd sa destination et se dégrade au fil du temps.Les Bénédictins, qui l'occupent depuis la moitié du VIe siècle après l'avoir restauré pour leurs activités, le confient le 24 mai 1212 à la commune d'Assise (créée en 1118)
Ainsi les architectures des peintures de Giotto sont enracinées dans les temples des divinités romaines, et structurent les vidéos de Bill Viola, dans cette mise en espace de la lumière, des images projetées qui éphémères utilisent la surface du bâti pour illuminer les volumes



Giotto. Hommage d'un simple (1297-1300). Fresque, 270 × 230 cm, Basilique Saint-François d'Assise, église supérieure.

Il s'agit de l'une des scènes de la légende de saint François. Un pauvre étend son manteau devant le jeune François. Un homme simple perçoit la sainteté de François, alors que les autres personnages restent dans l'expectative. L'arrière-plan architectural représente le temple de Minerve à Assise.




Giotto : Scènes de la vie de la Vierge : la naissance de la Vierge. 1304-1306. Fresque, 200 x 185 cm. Padoue : la chapelle Scrovegni ou chapelle de l’Arena


Après leur rencontre à la porte d'Or, Joachim et Anne rentrent chez eux pour attendre la naissance annoncée par l'ange. l'épisode de cette fresque se déroule à l'intérieur de la maison du couple, là même où Anne reçut le message de l'ange

Marie est représentée deux fois. Au premier plan une servante lui nettoie les yeux après l'avoir langée. Cela fait, elle est présentée à Anne qui tend avidement les bras pour la recevoir et l'embrasser pour la première fois.

Nous pouvons faire le lien entre Giotto, Bill Viola et Dan Flavin  
en évoquant " la lumière comme espace " et " la surface colorée par la lumière comme espace de méditation ", et "la couleur comme lien entre la lumière et les rythmes du cosmos" et la couleur comme élément cyclique et éphémère des images peintes, des images projetées, des images absentes et laissant place à la lumière projetée et à l'ombre qui la soutient 

nous pouvons relier cela à l'oeuvre "Untitled" réalisée à l'église de Santa Maria Annonciata dans l'église rouge, conçue en 1932 par l'architecte Giovanni Muzio, qui a fait l'objet d'une intervention spécifique de Dan Flavin: un système de néons qui illumine toute l'église en vert, lumière bleue , rose, doré et ultraviolet. La séquence chromatique du traitement de la nef, du transept et de l'abside suggère la progression d'un jour vécu, de l'aube au crépuscule.Un travail rendu possible par l'action conjointe du révérend Julius greco, qui en 1996, l'année où Flavin est mort, l'a invité à concevoir un projet pour l'église, et à la Fondazione Prada, qui un an plus tard, à l'occasion d'une grande rétrospective de l'artiste, il entreprit de réaliser le travail avec le Dia Center for the Arts de New York et le Dan Flavin Estate.

Santa Maria in Chiesa Rossa, Milano, l'architecte Giovanni Muzio dans les années 30


Dan Flavin, Untitled, 1977, installazione permanente, luce fluorescente blu, rossa gialla e ultravioletta, Santa Maria in Chiesa Rossa, Milano, courtesy of Fondazione Prada, Milano, photo : Paola Bobba

Dan Flavin, Untitled, 1977, installazione permanente, luce fluorescente blu, rossa gialla e ultravioletta, Santa Maria in Chiesa Rossa, Milano, courtesy of Fondazione Prada, Milano, photo : Paola Bobba
la paroisse de Santa Maria Annunciata in Chiesa Rossa, écrit à Dan Flavin pour lui demander de l’aider à rendre son église plus conviviale, plus “inspirée”... Indirectement sollicité, il avait déjà refusé car il souffre, d’une part, d’un grave diabète et surtout parce qu’il n’a jamais accepté d’intervenir dans des monuments religieux consacrés. Jeune séminariste chez les Jésuites, il avait gardé un très mauvais souvenir de l’Eglise catholique...
Contre toute attente pourtant, à la réception de la lettre du padre Giulio, il accepte. À partir de ce moment, se met en place un extraordinaire mécénat, qui va soutenir le projet, c’est-à-dire la collectionneuse Laura Mattioli Rossi et deux grandes fondations que sont la Dia Fondation de New York et la Fondation Prada de Milan. Flavin envoie son assistant Steve Morse photographier et faire le relevé de l’église et malgré son hospitalisation, boucle le projet de l’installation le 27 novembre, deux jours avant de mourir.

Elle sera inaugurée pour le premier anniversaire de sa mort. Flavin a redessiné l’espace avec ses tubes de couleurs. La voûte de la nef centrale s’illumine d’un bleu intense qui va se dégradant dans les nefs latérales. Une chaude lumière rouge inonde le transept tandis que l’abside et l’autel rayonnent des ors tels ceux des mosaïques byzantines. C’est le soir que les lumières prennent toute leur intensité quand les ultraviolets traquent et exaltent tous les blancs présents dans l’église, aussi bien celui des murs que celui des vêtements des fidèles ou visiteurs. 


Dan Flavin, Intérieur de Santa Maria Annunciata à Chiesa Rossa
Dan Flavin, Untitled, 1977, installazione permanente, luce fluorescente blu, rossa gialla e ultravioletta, Santa Maria in Chiesa Rossa, Milano, courtesy of Fondazione Prada, Milano, photo : Paola Bobba

Dan Flavin, Untitled, 1977, installazione permanente, luce fluorescente blu, rossa gialla e ultravioletta, Santa Maria in Chiesa Rossa, Milano, courtesy of Fondazione Prada, Milano, photo : Paola Bobba

Dan Flavin, Untitled, 1977, installazione permanente, luce fluorescente blu, rossa gialla e ultravioletta, Santa Maria in Chiesa Rossa, Milano, courtesy of Fondazione Prada, Milano, photo : Paola Bobba

 Dan Flavin, Untitled, 1977, installazione permanente, luce fluorescente blu, rossa gialla e ultravioletta, Santa Maria in Chiesa Rossa, Milano, courtesy of Fondazione Prada, Milano, photo : Paola Bobba
 Dan Flavin, Untitled, 1977, installazione permanente, luce fluorescente blu, rossa gialla e ultravioletta, Santa Maria in Chiesa Rossa, Milano, courtesy of Fondazione Prada, Milano, photo : Paola Bobba

Dan Flavin, Untitled, 1977, installazione permanente, luce fluorescente blu, rossa gialla e ultravioletta, Santa Maria in Chiesa Rossa, Milano, courtesy of Fondazione Prada, Milano, photo : Paola Bobba

 Dan Flavin, Untitled, 1977, installazione permanente, luce fluorescente blu, rossa gialla e ultravioletta, Santa Maria in Chiesa Rossa, Milano, courtesy of Fondazione Prada, Milano, photo : Paola Bobba
Dan Flavin, Untitled, 1977, installazione permanente, luce fluorescente blu, rossa gialla e ultravioletta, Santa Maria in Chiesa Rossa, Milano, courtesy of Fondazione Prada, Milano, photo : Paola Bobba
Dan Flavin, Untitled, 1977, installazione permanente, luce fluorescente blu, rossa gialla e ultravioletta, Santa Maria in Chiesa Rossa, Milano, courtesy of Fondazione Prada, Milano, photo : Paola Bobba
Dan Flavin, Untitled, 1977, installazione permanente, luce fluorescente blu, rossa gialla e ultravioletta, Santa Maria in Chiesa Rossa, Milano, courtesy of Fondazione Prada, Milano, photo : Paola Bobba

Dan Flavin, Untitled, 1977, installazione permanente, luce fluorescente blu, rossa gialla e ultravioletta, Santa Maria in Chiesa Rossa, Milano, courtesy of Fondazione Prada, Milano, photo : Paola Bobba

Dan Flavin, Untitled, 1977, installazione permanente, luce fluorescente blu, rossa gialla e ultravioletta, Santa Maria in Chiesa Rossa, Milano, courtesy of Fondazione Prada, Milano, photo : Paola Bobba

L'installation " Untitled " à Santa Maria Annunciata rejoint le sensible souffle des projections de Bill Viola, ainsi en en 2002 Bill Viola réalise “ Emergence” ( d’aprés la peinture la mise au tombeau de Masolino mais pas uniquement )

Bill VIOLA Emergence 2002 High definition video master tape 198.1 x 198.1 cm (78 x 78 in.) © Bill ViolaThis work was commissioned by the J. Paul Getty Museum



Masolino da Panicale, known as Masolino (Panicale 1383? – ca. 1440) Pieta.1424 Technique and Materials: detached frescoSize: 280 cm. x 118 cm.Provenance: Baptistery of the Collegiate Church of Sant’Andrea

L'installation " Untitled " à Santa Maria Annunciata rejoint le sensible souffle des projections de Bill Viola et génère le rythme métaphysique spatial des peintures de Giotto avec " la surface comme espace " " la lumière colorée comme plan architectural ", "la couleur comme lien entre la nature et les rythmes du cosmos", " l'ombre comme élément cyclique et éphémère qui soutient le tout ", dans des installations qui tel un prisme de lumière dont la contemplation est le principal faisceau, l'architecture en est le miroir, et le rythme des jours est la cadence de la couleur qui y construit l'espace, toujours en mouvement comme la respiration de l'âme.