258- L'OBJET ET LE SACRÉ



243- LA BEAUTÉ

Claes OLDENBURG et Coosje van BRUGGEN, Flying Pins,,Intersection of John F. Kennedylaan and Fellenoord, Eindhoven, the Netherlands
Commissioned by Gemeente Eindhoven Dienst Maatschappelijke en Culturele Zaken and Van Abbemuseum, Eindhoven, the Netherlands, Steel, fiber-reinforced plastic, polyvinyl chloride foam; painted with polyester gelcoat and polyurethane enamel,  Eleven elements in an area approximately 123 ft. (37.5 m) long x 65 ft. 7 in. (20 m) wide; ten pins, each: 24 ft. 7 in. (7.5 m) high x 7 ft. 7 in. (2.3 m) widest diameter;
ball: 9 ft. 2 in. (2.8 m) high x 22 ft. (6.7 m) diameter, Installed April-May 2000

Les objets sont tous issus de notre fabrication, à travers la profusion de leur présenceet leur occupation surdimensionnée de l'espace , les objets du luxe se déplacent via les objets idolâtrés de l'art.

nous allons interroger le sens de cette idolâtrie ( cela à travers l'analyse de la beauté )

- L'objet est lié aux humains et à la société ( État de vie collective; mode d'existence caractérisé par la vie en groupe; milieu dans lequel se développent la culture et la civilisation, milieu qui définit les besoins et crée, fabrique, vend les objets et les besoins qui vont avec )
-L' objet et la société dans l'espace architectural
-L'objet et la société dans les classes sociales
-L'objet /la société et l'impact des grandes marques 
-L'objet/ la société et l'histoire
-L'objet/ la société et le luxe
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Nous poserons la définition du mot" objet" et verrons comment un objet en étant " nommé  " devient " une chose "et à partir de là entre dans notre système de pensée

Objet : nom masculin est emprunté au latin scolastique objectum, participe passé neutre substantivé du latin classique objicere « jeter devant, placer devant » et « opposer ». Ce verbe est le préfixé de jacere (jeter) en « ob » préverbe et préposition de sens local, « devant, au-devant de », d'ou « en vue de » (au physique et au moral) et « contre » (avec hostilité), « en échange de », L'étymologie de ob n'est pas établie. Objectum, proprement « ce qui est placé devant » est employé avec un qualificatif dans objectum formale « objet formel » par opposition à objectum materiale « objet matériel » il entre, dans la locution objecto habere « avoir pour objet » (Thomas d'Aquin). Il désigne aussi ce qui possède une existence en soi, indépendante de la connaissance ou que l'idée que les sujets pensants en peuvent avoir (Duns Scott), et s'oppose à subjectum (sujet).
Le mot a été introduit par les philosophes médiévaux (Oresme) pour désigner ce qui affecte l’un des cinq sens. Cette acception s'est répandue au XVIe siècle dans l'usage commun, essentiellement restreinte à « ce qui affecte la vue le toucher », bien que Furetière (1690) englobe sous ce terme « ce qui frappe l'odorat, le goût, l’ouïe », Privilégiant la vue. Le XVIe et le XVIIe siècle, ont fait, de objet un synonyme de aspect, apparence, spectacle (d'un Etre ou d'une chose) et l’ont abstrait en « vision, image mentale », par exemple dans la locution à cet objet « à cette vue ». Objet est appliqué à des êtres ou à des choses suscitant un intérêt et un comportement d'ordre affectif, valeur encore vivante et sensible dans des syntagmes déterminés (Etre un objet digne de). Le XVIIe et le XVIIIe siècle, l'ont employé en particulier à propos de la femme, de l'amant ou de l'amante, aussi avec un déterminatif, par exemple dans objet de ma flamme, objet de mon Cœur. - Dans le domaine abstrait, le mot semble d'abord se référer à une réalité mentale, désignant dès les premiers emplois ce qui occupe l'esprit, la pensée, sens introduit lui aussi par Oresme (1370-1372) et qui débouchera d'une part sur une définition philosophique dans son opposition à sujet (av. 1650, Descartes), de l'autre sur des emplois didactiques et courants; objet se rapporte à ce vers quoi tendent l'Etre humain, les désirs, l'action, la volonté, se rapprochant de but dans des locutions comme avoir pour objet, sans objet et remplir son objet ; il concerne ce sur quoi s'exerce l’action ou l’activité de la pensée.
Ce n’est qu’au XVIIIe siècle que objet commence à se réfère dans l’usage général çà une chose concrète avec le sens courant de « chose de dimension limité et destiné à un certain usage »

" Res ", Latin- Français : chose, quelque chose.

Rien ne destinait sans doute le mot latin res à une si longue carrière philosophique, de Cicéron au « réisme » de Brentano, à travers la scolastique latine et la métaphysique scolaire allemande des XVIIe  et XVIIe siècles, sinon sa remarquable indétermination initiale. Cette carrière lui aura permis, en passant par la rhétorique, le champ économique, juridique, logique et enfin métaphysique, de se poser non seulement en possible équivalent du terme tenu pour le plus commun : to on « l'être ou l'étant », mais encore de le déborder pour ainsi dire en direction du quelque chose ou rien : aliquid / nihil, jusqu'à s'ériger en terme absolument premier. Tandis que, sur un autre versant sémantique, les dérivés realis, realitas ouvraient le champ de la formalité et de la possibilité.
L'histoire philosophique du mot res est sans doute assez étroitement parallèle à celle du terme grec pragma dont le sens est d'abord juridique et rhétorique. Le pragma désigne le fait ou l'affaire qui doit être discuté, débattu et jugé dans un procès et pas seulement la réalité matérielle et individuelle donnée ou présente immédiatement. C'est pourquoi ce même terme peut aussi caractériser ce qui est visé par un mot ou une proposition, le sens ou l'état de choses dont il est question. Tel est certainement l'usage platonicien du terme dans la lettre VII, 341c : ta pragma auta ne signifie pas la chose en soi, mais bien plutôt l'affaire en question, « les problèmes » débattus ou la « matière » disputée.

les termes arabes say "Chose" et Say'iyya « choséité » ou mieux « réalité » avaient une histoire propre, tout à fait indépendante du Pragma aristotélicien, et liée aux débats de la théologie islamique sur l'inexistant dont on trouve encore un écho, après Avicenne, chez Sahrastani (Iranien musulman du XIIe siècle) « L'inexistant est-il une chose ou non », mais dont l'arrière-plan plus lointain renvoie à Al-Kindi et Al-Farabi et aux positions du kalam mu'tazilite pour lequel la chose est ce qui est connu et pour qui tout inexistant est une chose.
C'est également à partir de cette ontologie formelle, centrée sur la chose, telle qu'elle s'élabore à partir d'Al-Farabi et d'Ibn Sina, que se développe, hors des cadres épistémologiques, l'algèbre comme science commune à l'arithmétique et à la géométrie ; faisant intervenir à titre d'inconnu la « chose », res (al-Say') qui peut désigner indifféremment un nombre ou une grandeur géométrique. Se dessinent ainsi les linéaments d’une nouvelle ontologie où  l’on peut parler d’un objet sans caractères déterminés, le connaître même, mais non le représenter exactement. Dans les traductions latines XIIIe siècle de l’algèbre arabe le terme qui sera finalement retenu pour désigner l’inconnu et res (res ignora) tandis que dans les mathématiques italienne ne langue vulgaire le mot cosa sera retenu.

La différence entre l’objet et la chose c’est que l’objet pour être un objet n'a pas besoin d'être nommé, c’est-à-dire que c’est une réalité. Alors que la chose est une chose parce qu’elle est nommée avec un nom. Mais si elle est nommée avec un nom, c’est qu’à un certain moment, il va pouvoir y avoir un échange. Passe-moi le verre, l’objet dont on parle à un nom. Si les objets ne posséde plus de nom ou que le nom ne coïncide pas avec l’objet, les objets ne sont plus des choses. Ils ne peuvent plus rentrer en circulation, ils deviennent statiques.
La nomination c’est faire en sorte que les objets n’existent pas comme objet mais comme chose, c’est-à-dire nommable ça veut dire qu’elle entre dans une conscience.
Un nom que l’on ne peut pas prononcer n’est pas un nom ou alors c’est une réalité innommable. Je prends cet objet, tant que je prends cet objet que je n’ai pas nommé, c’est une réalité. Si je vous demande qu’est ce que c’est ? La réponse est c’est un … le mot… est un nom qui nomme la réalité. La réalité elle-même est silencieuse, c’est un existant et j’ai besoin de le nommer.
La réalité à un nom, elle permet de transmettre, on entre dans l’histoire. Entrer dans l’histoire, c’est transmettre la façon dont les réalités existent non pas en tant qu’objet, mais en tant qu’objet nommé donc de chose, donc transmissible par le langage. La parole est la chose, un mot n’est pas une chose, mais les deux sont de l’ordre de la transmission. La Parole, le discours c’est la circulation des choses.

Qu’est ce que c’est que la nomination ? C’est faire en sorte que les choses n’existent pas comme objet mais comme chose, c’est à dire nommable. Ca veut dire quoi nommable ? Quelle rentre dans une conscience.

Ainsi Pierre Bourdieu dans ( P. Bourdieu, A. Dardel, ) L'Amour de l'art, 1969 nous dit que le monde des objets est sacralisé par le système muséal qui transforme en reliques élitistes un héritage que la bourgeoisie s'approprie et qu'elle utilise comme barrage pour maintenir en place les inégalités sociales du pouvoir .
" Si l'amour de l'art est bien la marque de l'élection séparant comme par une barrière invisible et infranchissable, ceux qui en sont touchés de ceux qui n'ont pas reçu cette grâce, on comprend que les musées trahissent, dans les moindres détails de leur morphologie et de leur organisation, leur fonction véritable, qui est de renforcer chez les uns le sentiment de l'appartenance et chez les autres le sentiment de l'exclusion. Tout en ces lieux saints de l'art où la société bourgeoise dépose les reliques héritées d'un passé qui n'est pas le sien, palais anciens ou grandes demeures historiques auxquels le XIXème siècle a ajouté des édifices imposants, bâtis souvent dans le style gréco-romain des sanctuaires civiques, concourt à indiquer que le monde de l'art s'oppose au monde de la vie quotidienne comme le sacré au profane : l'intouchabilité des objets, le silence religieux qui s'impose aux visiteurs, l'ascétisme puritain des équipements, toujours rares et peu confortables, le refus quasi systématique de toute didactique, la solennité grandiose du décor et du décorum, colonnades, vastes galeries, plafonds peints, escaliers monumentaux, tout semble fait pour rappeler que le passage du monde profane au monde sacré suppose, comme dit Durkheim, « une véritable métamorphose », une conversion radicale des esprits [ ... ]. Si, par son sacré, l'œuvre d'art exige des dispositions ou des prédispositions particulières, elle confère en retour sa consécration à ceux qui satisfont à ses exigences, à ces élus qui se sont eux-mêmes choisis par leur aptitude à répondre à son appel. Accorder à l'œuvre d'art le pouvoir d'éveiller la grâce de l'illumination esthétique en toute personne, si démunie soit-elle culturellement, et de produire elle-même les conditions de sa propre diffusion [...], est s'autoriser à attribuer dans tous les cas aux hasards insondables de la grâce ou à l'arbitraire des « dons » des aptitudes qui sont toujours le produit d'une éducation inégalement répartie.
P. Bourdieu, A. Dardel, L'Amour de l'art, 1969.

Le philosophe Wittgenstein dans son ouvrage " Investigations philosophiques " §126 place seulement toute chose devant nous et n’explique ni ne déduit rien, puisque que tout est étalé sous nos yeux il n’y a rien à expliquer. Ce qui est caché ne nous intéresse pas, c’est une invention. L’objet c’est ce qui d’aucune manière n’est caché. Pour Kant aussi, l’objet se montre, ce qui est caché c’est la chose en soi ; pour Wittgenstein la philosophie c’est la pensée de ce qui est là. Ce qu’il y a de commun aux deux c’est que l’objet est ce qui est dans l’évidence de l’expérience, ce qui dans l’expérience est effectivement là.
§109. « Nous ne devons construire aucune théorie, il ne doit y avoir rien d’hypothétique dans nos constatations, toute explication doit disparaître et être remplacée par de la description. »
Le programme est aussi celui d’une description pure de ce qui est sous nos yeux. L’objet est l’unité possible dans une description pure.  « Description pure », c’est ce qui rend raison de l’objet, d’une part du  problème de ce qui fait qu’il est là, d’autre part de ce qui fait qu’il est là pour moi, dans le cadre d’une expérience singulière déterminée qui est la mienne. Donc, rendre raison et de la passivité et de la synthèse, qui est langagière pour Wittgenstein, mais pas nécessairement pour Husserl pour qui elle se situe plutôt du côté des intentionnalités de la conscience.
La tâche de la philosophie est donc une tâche descriptive, ce qui se situe directement dans l’héritage de Kant. C’est une tradition empiriste puis scientiste qui insiste sur la passivité. On part de l’objet, voire de l’objectivité. On privilégie le côté donation. La tradition transcendantale met l’accent sur le côté de la constitution.
Parenthèse. Il faudrait savoir qu’elle est la position de la théorie de l’objet dans la psychanalyse. On pourrait s’en débarrasser en disant que sous le même mot se cachent deux choses différentes. À quelle épreuve est soumise la catégorie d’objet ? Chez Lacan, il y a un mouvement qui tend à assigner l’objet au statut d’une cause. C’est un schème qui n’est ni celui de la donation ni celui de la constitution. Si l’objet est cause du désir cela suppose qu’il soit donné, qu’il y en ait même une donation primordiale, une archi-donation. Il n’est pas réductible néanmoins à cette donation : en tant qu’il va revenir à sa place il va fonctionner comme cause du désir. Mais l’objet cause du désir n’est pas comme tel constitué par le sujet, on dirait plutôt l’inverse. Pour Lacan l’objet est le corrélat contingent du sujet, par quoi une partie de l’inconscient est machinée. Le sujet du désir n’est rien sans l’objet, mais l’objet est contingent. L’objet assigne le sujet à une radicale contingence de son être.
 
Mouvement imbriqué de nécessité, d'utilité et de désir, l'objet est investi de rapport entre le réel et la limite de l'interprétation, la liberté et le désintéressement de la non propriété; Ainsi Claes Oldenburg spatialise l'objet en le traitant sous ses differents aspects urbains et architecturaux : les objets deviennent des espaces dans lesquels, à l’intérieur desquels nous vivons et fonctionnons. Il n'y a plus d'extériorité, plus de là présent devant soi, mais engloutissement par la chose nommée .

Dès 1924, André Breton proposait la fabrication et la mise en circulation d’objets apparus en rêve : il en attendait, rappelle-t-il en 1936, dans le texte « Crise de l’objet », écrit pour le catalogue de l’« Exposition surréaliste d’objets » de la galerie Charles Ratton (22-29 mai 1936), non seulement une « dépréciation » des objets convenus, susceptible de « déchaîner les puissances d’invention », mais, surtout, une objectivation de l’activité du rêve : ces objets d’origine onirique devaient être de « véritables désirs solidifiés ». Il faut attendre l’année 1930-1931 pour en voir les premières réalisations, publiées dans le Le Surréalisme au service de la Révolution (n° 3, décembre 1931), et que Salvador Dalí présente alors comme des « objets à fonctionnement symbolique » : la Boule suspendue de Giacometti, l’assemblage avec la selle de bicyclette de Breton, le Veston aphrodisiaque de Dalí, un objet proposé par Gala Eluard, et cette petite boite créée par Valentine Hugo. André Breton, qui a une relation amoureuse avec l’ex-femme du poète Jean Hugo en ce début des années 1930, le gardera jusqu’à sa mort dans son atelier de la rue Fontaine, le plaçant dans le « mur » derrière son bureau (aujourd’hui dans la collection du Musée).
la création des « objets surréalistes » répond à la nécessité de fonder, selon l'expression décisive de Paul Eluard, une véritable « physique de la poésie ».  Les objets qui prennent place dans le cadre de l'exposition surréaliste de mai 1936 sont avant tout de nature à lever l'interdit résultant de la répétition accablante de ceux qui tombent journellement sous nos sens et nous engagent à tenir tout ce qui pourrait être en dehors d'eux pour illusoire. Les poètes, les artistes se rencontrent avec les savants au sein de ces « champs de force » créés dans l'imagination par le rapprochement de deux images différentes. Cette faculté de rapprochement des deux images leur permet de s'élever au-dessus de la considération de la vie manifeste de l'objet, qui constitue généralement une borne. Sous leurs yeux, au contraire, cet objet, tout achevé qu'il est, retourne à une suite ininterrompue de latences qui ne lui sont pas particulières et appellent sa transformation. La valeur de convention de cet objet disparaît pour eux derrière sa valeur de représentation, qui les entraîne à mettre l'accent sur son côté pittoresque, sur son pouvoir évocateur. « Qu'est-ce, écrit M. Bachelard, que la croyance à la réalité, qu'est-ce que l'idée de réalité, quelle est la fonction métaphysique primordiale du réel ? C'est essentiellement la conviction qu'une entité dépasse son donné immédiat, ou, pour parler plus clairement, c'est la conviction que (c'est moi qui souligne) l'on trouvera plus dans le réel caché que dans le donné immédiat ». Une telle affirmation suffit à justifier d'une manière éclatante la démarche surréaliste tendant à provoquer une révolution totale de l'objet : action de le détourner de ses fins en lui accolant un nouveau nom et en le signant, qui entraîne la requalification par le choix (« ready made » de Marcel Duchamp); de le montrer dans l'état où l'ont mis parfois les agents extérieurs, tels les tremblements de terre, le feu et l'eau; de le retenir en raison même du doute qui peut peser sur son affectation antérieure, de l'ambiguïté résultant de son conditionnement totalement ou partiellement irrationnel, qui entraîne la dignification par la trouvaille (objet trouvé) et laisse une marge appréciable à l'interprétation au besoin la plus active (objet trouvé-interprété de Max Ernst); de le reconstruire enfin de toutes pièces à partir d'éléments épars pris dans le donné immédiat (objet surréaliste proprement dit). La perturbation et la déformation sont ici recherchées pour elles-mêmes, étant admis toutefois qu'on ne peut attendre d'elles que la rectification continue et vivante de la loi.
Vers 1910-1912, la question se pose pour la première fois : quel allait être le sort de l'objet dans la peinture ? Le cubisme venait de révéler les structures secrètes des objets familiers - guitare, bouteille ou jeu de cartes -, le futurisme de détecter les trajectoires secrètes qui les unissent. Picasso, Duchamp, Kandinsky avaient ainsi créé les conditions d'une crise de l'objet qui aboutira finalement à la substitution du modèle intérieur au sujet extérieur. A ce sujet/ objet, il ne reste plus dès lors comme issue qu'à déserter la toile peinte dans le cadre de laquelle il n'entre plus.
C'est à Marcel Duchamp que l'objet le plus familier doit d'accéder à son existence propre et de manifester sa « vertu », comme dira Breton, en dehors même du tableau. C'est le ready-made, ou objet manufacturé promu à la dignité d'objet d'art par le seul choix de l'artiste. Ce que l'on escompte ici, comme dans l'image surréaliste, c'est le violent télescopage de réalités éloignées, la sauvage poésie de l'incongruité. De son côté, Man Ray, de 1916 à 1920, enrichit ses tableaux d'objets étrangers : bouton de sonnette, mèche de cheveux, pince à linge... En 1920, il les détourne de leur fonction en leur attribuant un titre qui dérange et contredit celle-ci, ou en leur ajoutant un autre objet qui les rend impropres à l'usage courant. Ici encore le télescopage de deux réalités inconciliables, dont les surréalistes attendaient beaucoup, rappelle l'axiome de Lautréamont : «Beau comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d'une machine à coudre et d'un parapluie. »
André Breton, dans son Introduction au discours sur le peu de réalité, propose aussi de fabriquer certains de ces objets qu’on n’approche qu’en rêve. L'accession à l'existence concrète et la mise en circulation de ces objets rêvés contribuent à conforter « l'une des plus remarquables lignes de force du surréalisme », dira-t-il en 1935. A cette fin sont assignés les poèmes-objets, que beaucoup de surréalistes, libérés pour cela des contraintes graphiques, fabriqueront, et les objets trouvés que Breton évoque dès 1928 dans Nadja, « objets démodés, fragmentés, inutilisables, presque incompréhensibles, pervers enfin ».
À la fin de 1931, la revue Le Surréalisme au service de la Révolution donne à l'objet surréaliste récemment apparu la place qu'il mérite désormais. Salvador Dalí y propose un catalogue général des objets surréalistes répartis en six catégories, dont :
- les objets à fonctionnement symbolique (objets « qui se prêtent à un minimum de fonctionnement mécanique, basés sur les phantasmes et les représentations provoqués par la réalisation d’actes inconscients »);- les ready-made (objets manufacturés qui accèdent au statut d'œuvre d'art par l'exposition qu'on leur destine); - les objets transsubstanciés (où la matière et la structure habituelles de l'objet se trouvent associées à d'autres : on pense par exemple aux montres molles de Dalí); les objets enveloppés (l'objet, la chose, l'architecture, le lieu, le corps sont recouverts d'une matière, voire ficelés);- les objets machines (fantaisies expérimentales animables, à signification souvent érotique); - les objets moulages (matérialisation de l’inconscient de l’artiste, de ses fantasmes ou de ses peurs). ( centre Pompidou )

La fonction d'usage permet de répondre à la question : à quoi sert l'objet t? 
Lors de l'achat d'un produit, l'utilisateur du produit va être influencé par les fonctions techniques de l'objet,

mais aussi par la forme, la couleur ou la matière de l'objet technique.
Tous ces paramètres liés aux goûts de l'utilisateur font partie de la fonction d'estime.
La fonction d’estime correspond aux goûts et aux différents ressentis d’un utilisateur envers un objet . Elle répond à la question : est ce que l’objet me plait et pourquoi il me plait ?
La fonction d’estime peut dépendre de plusieurs critères :
• l’esthétique de l’objet, c’est-à-dire tout ce qui est relatif à la beauté de l’objet. Elle peut concerner la forme, la couleur, la matière de l’objet technique.
• les fonctions techniques qu’il remplit, plus un objet technique a des fonctions plus il peut plaire à l’utilisateur ;
• du prix ;
• de l’image qu’il peut renvoyer à l’utilisateur ;
• des besoins de l’utilisateur.
Un objet c'est alors un miroir, une mise abyme de la personne qui s'en sert .
La fonction d'estime est alors la relation au beau et c'est l'aspect où la personne interprète l'objet et où ce qui est utilisé est l'interprétation et non pas l'objet lui même, ainsi plus on a un rapport sensible aux choses moins on les utilise ou moins on désire les posséder et plus on développe la sensibilité et la perception .
Les artistes " dans leur rapport interprétatif " donc dans leur jugement esthétique, amène à son paroxysme le processus du désintéressement,  ils ne sont pas intéressés par la possession de l'objet ni par sa fonction, mais par leur interprétation . Et ils pousse cela jusqu'à la destruction de la fonction de l'objet ( détournement, ready made ....) c'est à dire la non utilisation ou fonction qui passe par la perception et non l'utilité et ainsi ils rendent l'objet au sacré, nous allons voir comment cette  "inutilité " est exprimé chez les artistes suivants